HADÈS Archéologie

Pont Saint-Jean

Fiche

Résumé

Un projet immobilier concernant deux parcelles du quartier du Pont Saint-Jean à Bergerac a donné lieu à des sondages d’évaluation archéologique, réalisés en mars 2007 par C. Scuiller (Inrap). Ils ont mis en évidence la présence d’un petit ensemble funéraire regroupant une dizaine de sépultures.

Au cours du mois de décembre 2007, après un décapage sur une emprise de 800 m², l’opération de fouille préventive a permis de mettre en évidence un ensemble de 15 inhumations en cercueil (Fig. 1), organisées selon deux rangées parallèles. Tous ces individus ont été déposés selon un axe est-ouest, tête à l’ouest, allongés sur le dos à l’intérieur d’un cercueil, le corps enveloppé d’un linceul.

L’échantillon est composé de 10 adultes et de 5 sujets immatures. Le groupe des adultes est constitué de 4 femmes, 4 hommes et 2 individus de sexe indéterminé, tous décédés relativement jeunes, à l’exception de l’un d’entre eux. Le groupe des immatures est constitué de 3 sujets décédés entre 5 et 9 ans, 1 sujet décédé entre 10 et 14 ans et un sujet féminin décédé entre 12 et 18 ans, probablement de la syphilis.

Le principal problème que pose cet ensemble est la raison de sa présence à cet endroit, sachant que l’intervention de fouille, menée sur une emprise plus large, n’a rien révélé de probant dans l’environnement immédiat de ces tombes. Quelques creusements ont été mis au jour, mais ils ne sont pas en relation directe avec l’occupation funéraire, étant soit antérieurs, soit postérieure à ces dépôts.

Une enquête documentaire menée par Yan Laborie (adjoint de conservation à la ville de Bergerac) révèle la présence d’une chapelle Saint-Jean dans ce quartier. Elle est peu mentionnée dans les archives, mais semble avoir été utilisée principalement entre les XIIIe-XIVe siècles et le XVIe siècle, puis abandonnée. En effet, la première des deux uniques mentions disponibles au sujet de cette chapelle date de 1409, attestant l’existence de l’édifice de culte, tandis que la seconde, datée de 1605 et lue dans un acte de reconnaissance, montre l’état d’abandon du bâtiment, puisqu’il y est évoqué comme « l’ancienne chapelle » du lieu.

En outre, la bonne gestion de l’espace funéraire et l’homogénéité des dépôts nous permettent de conclure à une période d’utilisation restreinte. Les éléments céramiques retrouvés dans le comblement des fosses nous montrent que ces inhumations sont certainement postérieures au début du XIVe siècle et antérieures à la période contemporaine.

En fonction des données issues de la fouille et de l’enquête documentaire, trois hypothèses ont été avancées :

– la première est une relation entre ces dépôts funéraires et la chapelle Saint-Jean, ce qui implique une période d’utilisation située entre le XIVe et le XVIe siècle, sachant que les sépultures sont postérieures au XIVe siècle et que la chapelle est réputée abandonnée au début du XVIIe siècle ;

– la deuxième suppose que ce groupe d’individus correspond à une famille protestante, qui se sont (ou ont été) exclus des cimetières paroissiaux. Cette hypothèse suggère une période d’utilisation postérieure au milieu du XVIe siècle ;

– la troisième est une relation entre ces dépôts funéraires et la présence de l’hôpital du Saint-Esprit à l’intérieur des murs de la ville, dans le quartier de Pédouille, situé à proximité du quartier Saint-Jean. Cet hôpital, fondé au XIIe siècle, était initialement situé hors les murs, dans le faubourg des Carmes-Vieux. Sa réinstallation dans le quartier de Pédouille en 1450 pourrait être à l’origine de la création d’un nouveau cimetière dans ses environs, sachant qu’il se trouvait à proximité du quartier Saint-Jean. Du fait qu’une mention dans un texte de l’année 1622 évoque le cimetière Saint-Esprit, il se pourrait donc que l’ensemble funéraire mis au jour dans le quartier Saint-Jean puisse avoir une relation avec ce cimetière.

Les résultats d’analyses radiocarbone ont révélé que ces inhumations étaient postérieures au milieu du XVIIe siècle. De ce fait, la première hypothèse concernant la relation avec la chapelle Saint-Jean peut être définitivement écartée. En revanche, il sera probablement délicat de privilégier l’une des deux dernières hypothèses.

David PERESSINOTTO, Coralie DEMANGEOT