HADÈS Archéologie

La Tour de Grède

Fiche

  • Responsable : Patrick BOUVART
  • Période de fouille : 2004
  • Localité : Oloron-Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques)
  • Type d’opération : 
  • Période :  ,
  • Agence : ATLANTIQUE

Résumé

RÉSUMÉ La tour de Grède est située dans le quartier Sainte-Croix (parcelle cadastrale 130 de la section AK). Ce bâtiment de plan quadrangulaire s’élève actuellement sur une hauteur avoisinant 19 mètres et conserve dans ses élévations l’essentiel d’une construction médiévale., Propriété de la commune, l’édifice a été classé au titre des Monuments Historiques en 1943. Depuis le début de l’année 2004, il fait l’objet d’un programme de réhabilitation sous la direction de M. Bernard Voinchet, Architecte en chef des Monuments Historiques. La restauration porte sur l’ensemble des maçonneries et, à cette occasion, des échafaudages ont été installés tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, jusqu’au sommet de la tour. C’est dans ce cadre qu’une opération de relevés et d’analyse archéologiques a été prescrite par le Service Régional de l’Archéologie et confiée au bureau d’études Hadès.

Aucune recherche historique n’étant prévue, les informations sur Oloron, sur le quartier Sainte-Croix et sur la tour de Grède nous ont été communiquées par MM. Jacques Dumonteil et Jean Luc Piat.

L’étude a été réalisée en deux temps : la phase d’analyse sur site a été effectuée en urgence en 2004 alors que les travaux de restauration avaient débuté, le rapport d’étude a fait l’objet d’une seconde commande par la ville d’Oloron, en novembre 2005.

Pour ce qui concerne le travail de terrain, nous avons été confrontés à diverses difficultés qui résultent de l’état de conservation des maçonneries et des conditions d’intervention. En effet, la tour de Grède a connu trois campagnes de restauration depuis le début du XXe siècle (vers 1922, en 1963 64 et dans les années 1980). Elles ont porté principalement sur la façade orientale et notamment sur les baies du rez-de-chaussée et celle du premier étage. Aucune étude archéologique n’avait été réalisée avant 2004. L’espace intérieur complètement vidé pour permettre l’installation des échafaudages conservait jusqu’alors trois niveaux de plancher et des vestiges d’escaliers. Les observations archéologiques ont permis de mettre en évidence la superposition de plusieurs campagnes de travaux. Cinq phases de construction et de modifications s’échelonnent entre la fin du XIIIe siècle et le XVIIIe siècle. Les vestiges du premier édifice (phase I) se résument à un soubassement et à la façade du rez-de-chaussée ouvrant sur la rue de la Justice par deux baies en arc brisé. Une construction ayant fonctionné au revers, avec une structure à pans de bois, est pour l’instant la seule hypothèse admise. L’aspect des baies fait privilégier l’idée d’un espace réservé au commerce. L’emprise de ce bâtiment ne correspondait pas obligatoirement au découpage parcellaire actuel. Un prolongement de la façade vers le sud permet d’envisager une troisième porte desservant un espace privatif. Ce postulat s’inscrit dans un schéma reconnu de division des espaces propres à certaines maisons polyvalentes des XIIe XIVe siècles. Afin de répondre à cette hypothèse, des fouilles archéologiques pourraient être envisagées en cas d’aménagement de la parcelle sud. La présence de fleurs de lys sur les piédroits en tant que décor authentique a été démentie : il s’agit d’un abus de restauration des années 1960. La demeure a donc pu appartenir à un noble (peut-être de la famille d’Agrèda) comme à un simple bourgeois.

La seconde phase correspond à la construction des maçonneries du rez-de-chaussée sur un plan quadrangulaire. Une large portées aménagée vers l’ouest-indiquant une relation avec un autre espace, intérieur ou extérieur. La restitution des parties supérieures et extérieures paraît difficile selon l’état des connaissances. L’approfondissement des recherches ne semble pas possible. La phase III, au milieu du XIVe siècle, donne définitivement l’apparence d’une tour au bâtiment. L’édification comprend deux étages établis sur le rez-de-chaussée préexistant. La construction va de pair avec celle du bâtiment contigu à l’ouest. Ce dernier possède un étage qui entretient une communication avec le premier étage de la tour. Il est alors possible d’évoquer les termes de « demeure à tour et salle ». Cette organisation est caractéristique de l’architecture urbaine aristocratique. La fonction résidentielle des espaces supérieurs de la tour est indéniable malgré l’absence de cheminée et de latrines. Mais ces dernières pouvaient être situées dans le bâtiment adjacent comme cela était souvent le cas dans ce type d’édifice. Le rang social et l’aisance du commanditaire sont annoncés par un programme architectural ostentatoire en façade est. Il n’hésite pas en effet à mettre en œuvre des éléments empruntés à l’architecture militaire, mais la disposition d’archères en croix pattée relève d’une stratégie de parade plus que de défense. L’appartenance au rang militaire, affirmée également par un niveau de toiture encaissée surmonté d’un chemin de ronde protégé par un parapet crénelé. La situation de la tour par rapport à l’enceinte de la ville prouve que celle-ci n’a pu tenir aucun rôle dans la défense du quartier Sainte-Croix. Une étude des élévations intérieures et extérieures du bâtiment contigu à l’ouest-permettrait de mieux cerner l’organisation et la fonction des espaces. Elle pourrait éventuellement apporter plus d’éléments de datation.

Les phases suivantes (IV et V) comprennent principalement une surélévation de la tour au-dessus du parapet crénelé et des modifications de niveaux de planchers avec ajout de divisions. Ces phases ont pu, en outre, être interprétées en fonction de données historiques qui indiquaient une destruction occasionnée par un délabrement des maçonneries à la fin du XVIIe siècle. À cette date ou au début du XVIIIe siècle la tour connaît quelques restaurations. Elle devient alors strictement résidentielle. La volonté d’apparat en façade est délaissée, certains éléments ornementaux sont même mutilés par les réaménagements. La tour conserve son aspect et son organisation interne jusqu’à l’intervention, au XXe siècle, d’une succession d’architectes qui tentent de la sauver. Les aménagements de ces périodes ne présentent pas de particularité remarquable et il ne semble pas possible d’obtenir plus d’informations sur l’histoire moderne de cette tour. Patrick BOUVART

Patrick BOUVART