HADÈS Archéologie

La sacristie de La Collégiale

Nos métiers Production scientifique Opérations La sacristie de La Collégiale

Fiche

  • Responsable : Dimitri PALOUMBAS
  • Période de fouille : 2012
  • Localité : La Romieu (Gers)
  • Type d’opération : 
  • Période :  ,
  • Agence : MIDI

Résumé

L’opération de sondages archéologiques conduite dans la salle dite « de la sacristie » de la collégiale de La Romieu a été prescrite en préalable à des travaux de restauration portant sur un ensemble de peintures murales datées du XIVe siècle. Outre les peintures, cette salle conserve les vestiges d’un pavement de terre cuite composé, pour partie, de carreaux glaçurés et estampés susceptibles de dater du Moyen Âge. Conscient de l’intérêt architectural de ces vestiges, le Service Régional de l’Archéologie de Midi-Pyrénées a prescrit une étude archéologique, dans le cadre de la mission de suivis de travaux sur Monuments Historiques. Cette étude avait deux objectifs principaux : d’une part, la caractérisation des vestiges enfouis ; d’autre part, la reconnaissance partielle du sol pavé. L’opération s’est déroulée durant une semaine, du 3 au 7 septembre 2012. Le responsable d’opération est intervenu durant une semaine, du 3 au 7 septembre 2012, assisté ponctuellement d’une topographe.

Le bilan de cette intervention archéologique s’est révélé très largement positif sur le plan des découvertes, malgré la faible durée de l’intervention. Rappelons que l’étude des pavements supérieurs de la PCE 1 a été abordée dans l’optique de répondre à plusieurs questions posées en préalable à l’intervention archéologique. Outre les interrogations relatives aux caractéristiques techniques de ces pavements (modules des carreaux, type de décor, méthode de mise en œuvre, etc.), le principal questionnement concernait l’authenticité de ces sols. L’enjeu était d’essayer de savoir si ces pavés avaient été mis en place d’un seul trait ou s’ils relevaient de différentes étapes de rénovation, à partir d’une matrice qu’il restait à définir.

Il est acquis que les plus anciennes structures mises au jour sont le ressaut maçonné RES 21 (fig. a), apparu à un peu moins de 0,70 m en dessous du seuil de la POR 9, et le parement USC 206 (phase 1, fig. b). Ces deux entités archéologiques ont été associées au sein d’une même séquence de construction. Les traces de bretture et l’utilisation d’un mortier identique au mortier de jointoiement du piédroit sud de la POR 9 attestent que le ressaut et le parement sont synchrones avec le reste de l’élévation de la PCE 1. On situera donc leur mise en place entre les années 1312 et 1318.

La date de mise en place des remblais US 104 et US 204 (phase 2) est incertaine sur le plan de la chronologie absolue. Le contexte stratigraphique, la densité et l’homogénéité des céramiques contenues dans ces deux remblais permettent néanmoins de considérer qu’ils ont été déposés dans la PCE 1 après le XIIIe siècle. À défaut de renseignements plus précis, nous proposons d’identifier ces remblais à la phase principale du chantier de construction de la TOUR 2 (1312 1318).

La phase 3 correspond à la mise en place de plusieurs (?) pavements à une époque indéterminée. Notre hypothèse est que les plus anciens pavés sont ceux de l’entité architecturale PAV 13, au sud de la PCE 1 (fig. c).

Les glaçures utilisées n’autorisent aucune fourchette de datation précise. Le fait que ce secteur pavé échappe à l’emprise de la fouille ne permet pas de le rattacher à la chronologie relative issue de l’étude des sondages 1 et 2. Il n’est pas irraisonnable de penser que l’entité architecturale PAV 13est en place : l’homogénéité de sa composition et l’utilisation de carreaux décorés de même module plaident en ce sens. Le cas échéant, nous situerions la pose du pavement PAV 13 peu après la mise en place des remblais US 104 et US 204. La phase 3est aussi définie par le niveau de terre cuite USC 203, dont les caractéristiques techniques demeurent imprécises, ainsi que par le secteur pavé PAV 40, mis au jour dans le CLR 4. Si l’hypothèse d’une datation médiévale est suggérée pour la phase 3, les séquences ultérieures semblent être intervenues après 1500.

Le reste des pavements qui composent le sol actuel de la PCE 1 apparaît en effet tardif. La variété des modules, l’absence de trame générale et la position stratigraphique des négatifs de carreaux dans les deux sondages incitent à penser que ces pavements ne sont pas authentiques. Les informations recueillies sont toutefois insuffisantes pour dater leur mise en place. Le double tournois découvert dans les couches d’abandon US 100/200 pourrait servir de terminus ante quem mais le contexte de sa découverte incite à l’utiliser avec beaucoup de prudence. Plus sûrement, les fragments de carreaux glaçurés retrouvés dans les différentes couches de support et d’isolement des pavements supérieurs prouvent que ces niveaux de sol sont des recharges. Le recouvrement de la couche de terre cuite USC 203 par le niveau damé USC 202 semble conforter cette hypothèse. Nous avons choisi de regrouper les pavements PAV 14, PAV 15, PAV 16, PAV 17, PAV 18, PAV 19, PAV 20 et PAV 22 dans une seule séquence (phase 4), tout en reconnaissant la part d’arbitraire de ce regroupement.

L’identification d’une phase 5 calée entre la mise en place des pavements supérieurs et la pose du plancher au XXe siècle est consécutive à la découverte de trois monnaies en cuivre et en bronze. Les dates qui figurent sur deux de ces monnaies (1639 et 1865) témoignent, a priori, d’une occupation continue de la PCE 1 du XVIIe siècle au XIXe siècle.

Cette occupation s’est prolongée tout au long du XXe siècle avec, en particulier, la mise en place d’un plancher (phase 6, époque indéterminé, années 1900 ?).Des pièces de monnaie récentes, dont une pièce de 5 francs, scellaient la stratigraphie de la PCE 1.

En dépit des incertitudes relatives à l’identification précise des phases en chronologie absolue, cette proposition de restitution a permis de mettre en exergue le potentiel archéologique des niveaux de sol et de sous-sol du rez-de-chaussée de la TOUR 2.

Assurément, les carreaux céramiques décorés comptent parmi les vestiges majeurs de cette salle. Si le répertoire décoratif livré par ces carreaux ne présente pas un caractère exceptionnel, l’existence d’un pavement attribuable au XIVe siècle est, en soi, une donnée remarquable. Les deux motifs floraux estampés du PAV 18, dont les éléments semblent identiques à ceux du PAV 13, sont particulièrement intéressants, l’introduction de cette technique étant traditionnellement située dans les années 1250. Pour commun qu’il soit dans le corpus des pavements estampés médiévaux de la France méridionale, le motif de la fleur de lys atteste que les carreaux anciens de la PCE 1 offraient un certain foisonnement ornemental.

Il semble que les hypothèses de datation concernant ces vestiges ont une base scientifique insuffisante toutefois. Clairement, l’origine des pavés décorés reste à déterminer : ont ils été conçus, d’emblée, pour la PCE 1, ou ont ils été rapportés tardivement ? Peut être sera t il possible, alors, de répondre aux questionnements relatifs à la vocation de la PCE 1. Si la fonction de sacristie est traditionnellement retenue, cette identification reste à authentifier pour la période médiévale. L’absence d’autel maçonné permet de déduire que la PCE 1 ne fut pas affectée à un usage de chapelle, a priori. Quant à la fonction de défense, elle semble peu compatible avec le morphotype des ouvertures pratiquées dans les murs de la tour.

Il convient également de mettre en avant l’importance des lots de céramiques collectés dans les remblais US 104 et US 204. Outre leur utilité pour la datation des pavements, les tessons recueillis alimentent le corpus des productions potières médiévales du département du Gers.

En définitive, on s’aperçoit que les questions au sujet du rez-de-chaussée de la TOUR 2 restent encore très nombreuses. Il est clair cependant que le sous-sol de cette salle recèle un potentiel archéologique important, pouvant autoriser des perspectives de recherche fructueuses. Ces recherches pourraient s’inscrire dans le cadre d’un projet global incluant, outre le volet sédimentaire, des recherches en archives et une véritable étude d’archéologie du bâti.

Dimitri PALOUMBAS