HADÈS Archéologie

La « maison Romanet »

Fiche

  • Responsable : Sandrine CONAN, Julien DENIS
  • Localité : Eymoutiers (Haute-Vienne)
  • Type d’opération : 
  • Période :  ,
  • Agence : MIDI

Résumé

La « maison Romanet », à Eymoutiers (Haute-Vienne), rue Combe Soury, est située entre la collégiale et la Vienne. C’est un vaste édifice au plan en L et à quatre niveaux, chacun composé de trois salles dont les différences de plan et d’épaisseur de murs forment une organisation complexe. La déclivité naturelle du terrain, d’ouest-en est, a permis l’aménagement d’un niveau de cave du côté de la Vienne.

Préalablement à sa réhabilitation par le Centre d’Aide par le Travail ARSSE, propriétaire du bâtiment, le Service Régional de l’Archéologie du Limousin a souhaité faire réaliser une étude archéologique du bâti, avant travaux.

Ainsi, une recherche historique, réalisée par M. Julien Denis, une analyse archéologique des élévations et des datations par dendrochronologie ont permis de retracer les grandes phases de la construction de la « maison Romanet « . Il subsiste cependant de nombreuses incertitudes. L’étude archéologique des maçonneries fournit des informations souvent difficiles à interpréter et quelquefois incomplètes, que les nombreux remaniements n’ont pas toujours permis de lier.

Les données historiques relatives à la topographie de la ville à la fin du Moyen Âge précisent que l’enceinte des chanoines du chapitre de la collégiale, dont les textes mentionnent la construction dès 1207, doit être détruite (ou tout au moins rendu inutilisable) lorsque l’on envisage, en 1428, de fortifier la ville. On ignore si la construction de cette nouvelle enceinte a été immédiatement engagée. Le mur épais, entièrement en pierre de taille et percé d’un portail, conservé à la cave, pourrait être un vestige du « claustrum ». Le caractère non fortifié de ce portail ne doit pas surprendre. Il ne s’agit pas d’une fortification proprement dite mais bien d’une clôture symbolique suivant le modèle monastique Ces vestiges indiquent que le « claustrum » du chapitre n’aurait pas été entièrement détruit au XVe siècle. Ils ont vraisemblablement servi au découpage du parcellaire en lanières, évoquant un « allotissement » des terrains, conséquence de l’abandon de la forteresse des chanoines et du remaniement de son schéma urbain. On y implante alors deux bâtiments indépendants et mitoyens, celui au sud appartenant aux Romanet, une puissante famille locale. Ces deux maisons ouvrent sur la rue publique, à l’ouest, où la façade est pourvue de fenêtres à meneaux différentes. On ignore la distribution intérieure des bâtiments, outre le fait que la maison des Romanet comprenait au moins deux pièces. de même, il ne subsiste aucune trace des circulations verticales.

Des incertitudes subsistent pour une datation plus précise des bâtiments. Les liens avec le mur de l’enceinte de la collégiale sont imprécis et la présence de vestiges médiévaux, autres que ceux de la fortification des chanoines, ne peut être écartée. Nous en prenons pour preuve le remploi de portes à arc brisé, des vestiges de décors peints en rouge et jaune sur des matériaux réutilisés et la présence d’une colonnette en colmatage d’une fenêtre. La réorganisation du parcellaire de la ville à partir du XVe siècle n’exclut pas en effet le maintien de bâtiments antérieurs, voire de « loges ou maisons » de chanoines. L’agrandissement de la maison Romanet en 1518, grâce à l’acquisition de la maison voisine, n’entraîne pas de profondes modifications. des portes sont percées pour faire communiquer les deux bâtiments et on tente de donner une harmonie à la façade sur rue avec, en particulier, la création d’une porte portant les armes des Romanet. Mais c’est à l’intérieur que l’embellissement est le plus notable avec l’apport de cheminées monumentales qui donnent à l’édifice une allure d’hôtel particulier. L’étage noble semble être alors le niveau supérieur.

Le plan actuel est redevable aux Ursulines, dont le couvent est attenant au sud. Elles achètent l’édifice en 1629 et l’occupent jusqu’à la Révolution. C’est à elles que nous avons attribué l’agrandissement du bâtiment à l’est, sa surélévation et la création de tous les plafonds de l’étage. Elles créent également, au sud, des communications directes avec le couvent. Les Ursulines imposent alors une figure classique à la maison par les nouveaux percements.

Enfin, les XIXe et XXe siècles n’ont pas apporté de modifications particulières, si ce n’est l’ouverture de portes de communications avec le bâtiment voisin, au nord, et des dommages irrémédiables à la façade du rez-de-chaussée par le percement de larges portes.

Contrairement à l’impression première qui ressort d’une visite des lieux, les nombreuses modifications de la maison Romanet ne permettent plus d’apporter de précisions sur les caractéristiques d’une demeure de la fin du Moyen Âge à Eymoutiers. La distribution, les éléments domestiques et la fonction des espaces, sauf de l’étage, restent inconnus ainsi que la façade sur rue du rez-de-chaussée. En fait, c’est la réutilisation systématique des matériaux et de baies anciennes, tant au XVIe siècle que par les Ursulines, qui confère au bâtiment un caractère faussement médiéval.

Le patrimoine médiéval de la ville d’Eymoutiers est riche. Alors on ne peut qu’espérer que cette étude serve d’amorce à celle du parcellaire autour de la collégiale et du bâti.

Sandrine CONAN, Julien DENIS