HADÈS Archéologie

La “Maison Roigt”, Rue des Liqueurs

Nos métiers Production scientifique Opérations La “Maison Roigt”, Rue des Liqueurs

Fiche

  • Responsable : Dany COUGET RULLIER, Jean BROUSTET
  • Période de fouille : 2005
  • Localité : Sainte-Bazeille (Lot-et-Garonne)
  • Type d’opération : 
  • Période :  , ,
  • Agence : ATLANTIQUE

Résumé

RÉSUMÉ La maison Roigt du nom de son dernier propriétaire, M. André Roigt, dans les années 1980 se situe dans le bourg ancien de la commune de Sainte-Bazeille (parcelle cadastrale n° 706). Ses origines, mais également la découverte de mosaïques antiques dans son sous-sol et la trace visible de multiples réfections au cours de l’époque moderne font de cette maison médiévale un élément du patrimoine architectural de grande qualité et, malgré cela, non protégé au titre des Monuments Historiques… Le bâtiment a été récemment acquis par la Communauté de commune du Val de Garonne qui envisage à terme d’y installer un musée archéologique intercommunal. Pour cette raison, le Service Régional de l’Archéologie a prescrit une étude archéologique préalable des élévations.

L’étude historique réalisée par Jean Broustet ne renseigne malheureusement pas le bâti : les documents d’archives sont pratiquement inexistants et surtout ne permettent pas de remonter au-delà du début du XIXe siècle. Les données sur le château qui s’élevait tout prêt manquent tout autant. Cette carence rend l’étude archéologique un peu plus complexe car l’édifice n’a presque aucun calage chronologique fiable.

Une première occupation du site durant l’Antiquité Le bâtiment est implanté sur un site antique, peut être un ancien vicus. Un sondage archéologique pratiqué au rez-de-chaussée, en 1989 par B. Abaz et ravivé par Jean Luc Piat dans le cadre de la présente étude archéologique du bâti, a mis au jour une mosaïque polychrome du IVe siècle et un mur dont l’orientation ne correspond pas avec celle du bâti médiéval. L’édifice antique est probablement détruit par un incendie.

Il ne semble donc pas exister de solution de continuité historique en matière d’occupation du sol, la trame de la ville médiévale n’étant pas fondée sur le parcellaire antique. Peut-être l’implantation de la forteresse de Sainte-Bazeille au XIIe siècle en est-elle la cause, l’organisation du castrum s’effectuant dès lors à partir du château. Un bâtiment de la fin du XIIe ou 1ère moitié du XIIIe siècle Les différents cadastres ne donnent aucune indication sur un éventuel rapport direct entre la maison Roigt et le château ou des courtines. Toutefois, la disposition générale de l’îlot suggère un tracé ancien, peut être celui d’une enceinte du château ou celui d’un premier bourg castral avant l’extension de la ville, au XIIIe siècle, suivant un plan régulateur.

De ce premier édifice, on ne peut restituer qu’un bâtiment rectangulaire d’assez vastes dimensions (80 m2 dans œuvre environ), divisé en deux niveaux. L’appareil en pierre de taille est datable du XIIIe siècle (peut-être de la fin XIIe) par son module et l’emploi fréquent de moellons de format carré. Les variations dans les épaisseurs des murs nord et sud et d’un contrefort sur le mur méridional laissaient supposer, à priori, le raccordement de deux édifices contigus ou l’extension d’un premier. Nous n’en avons pas trouvé de preuve formelle. La présence d’une arcature au rez-de-chaussée, dans les murs nord et est, n’a pas été expliquée. Certains arcs pourraient être des passages vers un bâtiment adjacent, mais seules des études complémentaires (sondages) pourraient le confirmer. Chacun des niveaux, de 4,50 m environ de hauteur, est pourvu d’un accès indépendant, celui du rez-de-chaussée donnant sur la rue dans l’angle nord-ouest. L’absence d’ouvertures dans les murs nord test permet de supposer la présence de constructions mitoyennes, les pièces ne pouvant donc prendre le jour que sur les deux autres faces. Le rez-de-chaussée était très probablement éclairé par une série de jours en fente dont un seul subsiste, qui s’apparente à celui de l’Hôtel de ville de La Réole, daté de la fin du XIIe début du XIIIe siècle. La façade principale, dotée d’un escalier de bois ou d’une galerie d’accès à l’étage, se situait sans doute sur le pignon, comme cela était souvent le cas, mais la reconstruction de ce mur à la Renaissance en a effacé toute trace. Quant à l’équipement domestique intérieur (cheminée, évier, latrines, etc.), on n’en conserve aucun vestige à l’exception de deux niches à lampes au rez-de-chaussée.

Le bâtiment à la fin du Moyen Âge Entre le XIIIe et la fin du XVe siècle, le rez-de-chaussée paraît inchangé, hormis peut-être le bouchage de l’arcature (à moins qu’il n’ait lieu plus tardivement). Il s’agit d’une pièce haute, faiblement ouverte sur l’extérieur et communiquant avec la rue. Elle a visiblement servi de « cave » ou d’entrepôt pour des tonneaux. En témoignent les anneaux sous le seuil de la porte d’accès du corridor pour le système de cordage et l’amaigrissement des jambages jusqu’à une certaine hauteur de la seconde porte. Même si l’histoire indique la vocation marchande de Sainte-Bazeille et notamment son négoce du vin depuis le Moyen Âge, il est cependant impossible d’affirmer que la pièce ait eu cette vocation depuis son origine. Ce rez-de-chaussée a donc pu être affecté au stockage de bien d’autres denrées ou produits manufacturés.

En revanche on ignore comment a évolué l’étage, la moitié du mur sud et le mur ouest-ayant disparu depuis. Mais on peut avancer qu’à la veille des transformations de la Renaissance, la hauteur intérieure du bâtiment est définie par les deux corniches de couronnement des murs nord et sud. L’espace est éclairé au moins par une baie géminée de la 2e moitié du XIIIe siècle, remployée dans le mur sud rebâti, et des aménagements intérieurs de confort sont pratiqués avec la construction de deux placards, peut-être d’une cheminée (vestige de piédroit) et d’une longue banquette de pierre. Enfin, le percement d’une porte dans le mur oriental indique une communication avec l’arrière du bâtiment. Cet étage, formé d’une salle spacieuse (mais peut être recoupée par une cloison en matériau léger dont on n’a plus la trace), ne présente pas les aménagements que l’on s’attendrait à trouver dans une maison urbaine du bas Moyen Âge. Ici, l’étage ne conserve aucun équipement domestique du type évier, cheminée et latrines, mais il est vrai qu’une partie des murs a été rebâtie ultérieurement. La configuration de la baie géminée (élément en remploi, il faut le rappeler), avec un appui haut et plein, sans coussiège, mais manifestant tout de même une volonté ostentatoire, et la présence de la banquette de pierre définiraient davantage un usage public que privé. La vocation de cette pièce reste donc à définir : a-t-elle pu servir de maison commune, de salle seigneuriale où l’on rendait la justice, ou a-t-elle toujours été un habitat privé urbain associé à un entrepôt en rez-de-chaussée ? La proximité du château conduirait à une autre hypothèse, celle d’une maison de chevalier.

Au XVIe siècle Le début du XVIe siècle est une période de reprise globale de l’édifice avec un redécoupage en trois niveaux. Le bâtiment témoigne à ce moment-là de la volonté affirmée de créer une habitation au goût du jour. La fonction est donc bien définie. Le rez-de-chaussée est une cave ou un entrepôt et la façade principale sur rue, presque entièrement rebâtie, met en valeur la fonction résidentielle. On accède au niveau habitable (à l’étage) par un porche au sommet d’un escalier nouvellement bâti.

Ces travaux, à partir de 1513 datation fournie par une analyse dendrochronologique de poutres et solives répond également à la volonté d’un meilleur éclairage que permettent les grandes croisées qui ajourent désormais tous les niveaux habitables.

L’archéologie du bâti montre que la restauration du bâtiment contigu au nord est contemporaine de celle de la maison Roigt proprement dite. Il est cependant difficile de dire si les deux édifices ont réellement fonctionné ensemble et s’il existe deux commanditaires des travaux ou un seul. Les XVIIIe et XIXe siècles Le bâti subit peu de transformations structurelles car la maison garde la même configuration. Les modifications sont : une ouverture sur la parcelle voisine au nord, la construction de la couverture du porche, l’ouverture d’une porte au rez-de-chaussée et la reconstruction de la moitié du mur sud. La brique fines un nouveau matériau qui permet de définir une partie des travaux engagés au XVIIIe siècle.

Sur le plan cadastral, en 1812 la parcelle ne comprenait pas la cour actuelle qui était l’emplacement d’un bâtiment accolé au sud. De même, la parcelle postérieure, à l’est, correspondait encore à deux parcelles bâties sans cour fermée. La parcelle latérale au nord était encore une parcelle laniérée avec une cour intérieure. En 1849, la parcelle actuelle est agrandie de celle confrontant à l’est, sans espace libre autour de la maison Roigt. Dany COUGET RULLIER

Dany COUGET RULLIER, Jean BROUSTET