HADÈS Archéologie

Habitation La Grivelière

Fiche

Résumé

L’habitation dénommée la Grivelière est située en Basse Terre, dans la commune de Vieux Habitants. Le 12 avril 1984, elle devient une propriété de la SARL «la Grivelière». En 1987, les bâtiments sont classés au titre des Monuments Historiques, puis sont finalement acquis par la Région Guadeloupe en 1988. Depuis, ils font l’objet de campagnes de restauration à des fins muséographiques et touristiques. Dans cette perspective, un projet de réhabilitation de plusieurs cases identifiées comme des logements pour ouvriers, voire peut être d’anciennes cases d’esclaves, a conduit le Service Régional de l’Archéologie à prescrire une campagne de fouilles. L’apparente ancienneté des structures de l’une d’elles et la volonté manifestée par la Région Guadeloupe de reconstruire à l’identique ont, par ailleurs, motivé une opération de relevés et d’analyse des élévations, avant et en cours de démontage. Plusieurs sources écrites permettent d’appréhender l’origine et l’évolution de cette occupation. Les prémices d’une valorisation de cette partie du versant de la Grande Rivière datent de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Les terres sont alors exploitées par deux petites habitations caféières comprenant des bâtiments d’exploitation agricole (moulin à café et séchoirs ou boucans), des logements pour le personnel (case servant de maison principale et cases d’esclaves), ainsi que des esclaves dont le nombre reste inconnu. Les vestiges demeurent non localisés. En 1842 1843, ces exploitations sont rachetées et regroupées par Auguste Perriollat pour former l’habitation la Grivelière. La culture du rocou est alors privilégiée. La main d’œuvre pourrait, à cette période, s’élevaient à 150 esclaves. Les conditions d’hébergements de cette population demeurent ignorées. À partir de 1855, les esclaves sont remplacés par 150 «travailleurs venus d’Inde» et une quarantaine de «chinois». Ces effectifs, probablement maintenus durant toute la seconde moitié du XIXe siècle, nécessitent l’aménagement de onze cases. Leur localisation fait seulement l’objet d’une hypothèse. Ces logements, couverts de tôle en 1893, pourraient se situer dans la parcelle dénommée Nouvelle Ville, en amont de l’implantation actuelle. Les plus anciennes constructions observées à l’emplacement de la maison principale et du boucan à tiroirs seraient attribuables à la famille Rollin ou à la société d’actionnaires relançant la production du café et du cacao au détriment du rocou. L’ensemble des logements de travailleurs étudiés sont seulement aménagés après 1922. La Grivelière est alors devenue la propriété de la famille Pagesy. Le plus ancien contexte observé en fouille est un dépotoir formé dans une irrégularité du terrain. La genèse de cette couche correspond à des colluvionnements par ravinement. L’occupation, logiquement située en amont, a très certainement procédé à un épandage de ses déchets domestiques. Le mobilier collecté, principalement du verre et de la céramique, est caractéristique du XIXe siècle. Le tesson d’un vase produit entre 1824 et 1836 à Choisy le Roi dans le Val de Marne offre un terminus post quem à la formation de ce dépotoir. Ce dernier ne peut donc pas correspondre aux rejets des premières habitations, mais il témoignerait éventuellement de la consommation de la population établie par Auguste Perriollat, d’abord les 150 esclaves, puis les 150 «travailleurs venus d’Inde».

L’absence de vestiges bâtis clairement attribuables à cette phase ne peut être imputable aux terrassements visant à établir les cases des travailleurs. C’est pourquoi, l’hypothèse d’une délocalisation est privilégiée. Ce constat conditionne toutes les perspectives d’approche du site. La restauration des logements de travailleurs ne menace aucun potentiel archéologique en dehors d’un mobilier résiduel. Par contre, des prospections devraient être envisagées sur la parcelle dénommée Nouvelle Ville. Même si le toponyme se rattache uniquement aux onze cases supposées construites à la fin du XIXe siècle, il est possible que la maison primitive d’Auguste Perriollat se trouve en amont. Ces entités témoigneraient d’une conception de l’habitation à une période charnière de l’histoire du site.

Patrick BOUVART