HADÈS Archéologie

Église

Fiche

Résumé

Dans le cadre de travaux de mise en valeur de l’église romane de Saint-Gelais (XIIe siècle ; fig. 1), classée au titre des Monuments Historiques depuis 1945, la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Poitou-Charentes (service des Monuments Historiques et Service de l’Archéologie) a demandé une expertise du sous-sol extérieur situé sur l’emprise du bras nord de l’ancien transept, aujourd’hui partiellement détruit. Les vestiges apparents révèlent en effet des structures bâties mal identifiées et un amoncellement de blocs, dont certains sculptés, qu’il était nécessaire de caractériser avant d’avancer le projet d’aménagement des abords extérieurs. Par ailleurs, la découverte, dans les années 1960, de tombes du haut Moyen âge non loin du sanctuaire et la présence de l’ancien cimetière paroissial médiéval et moderne autour de l’église, aujourd’hui transféré, imposaient de vérifier la profondeur d’apparition des éventuels niveaux sépulcraux.

C’est dans ce contexte qu’un sondage archéologique a été réalisé sur l’emplacement de l’ancien bras nord du transept. L’enlèvement des blocs de pierre taillés a montré que les sculptures correspondaient pour l’essentiel à des nervures de voûtes gothiques.

Le dégagement à l’aide d’une pelle mécanique des terres accumulées le long du mur occidental de l’ancien transept a ensuite permis de mettre en évidence le substrat calcaire sur lequel est établi le sanctuaire ainsi qu’une fosse sépulcrale et plusieurs maçonneries et niveaux de sol d’époques différentes. Les correspondances stratigraphiques ont permis d’identifier six phases principales.

La première correspond à la construction du transept nord d’époque romane matérialisée par la mise au jour de trois assises d’élévation du côté ouest, entièrement rubéfiées, et une bonne partie de son mur est. Contre le mur ouest, deux niveaux de sols ont été observés. Le plus ancien repose sur le substrat calcaire. Il s’agit d’une couche d’argile recouverte d’une fine pellicule calcaire contenant quelques tessons de céramique médiévale. Le sol le plus récent est établi sur une recharge d’argile et d’éclats de pierre recouverts de limons fins et cendreux. Il s’agit d’un niveau d’incendie. Par endroits, sur ce sol, il a été remarqué des lambeaux de mortier de chaux, empreintes probables d’un dallage, non retrouvé.

La seconde phase est marquée par le niveau d’incendie et l’arasement partiel de la construction du mur ouest du transept. La date de l’incendie n’est pas établie, mais l’arasement doit être effectif peu avant la troisième phase, liée à la reconstruction, au-dessus de l’ancienne fondation, d’un mur avec une nouvelle arcade de communication vers le collatéral nord. En revanche, sur le mur est du transept, l’arcade de communication avec l’ancienne absidiole est condamnée afin de permettre l’aménagement d’une chapelle particulière. Cette phase appartient à la restauration générale du sanctuaire, entreprise à partir de la seconde moitié du XVe siècle. La fosse sépulcrale, établie au centre du bras de transept, postérieure au niveau d’incendie, doit appartenir à cette période.

La quatrième phase correspond à la fermeture de l’arcade de communication du transept nord avec la travée de transept pour asseoir une volée d’escalier et son massif de soubassement (fig. 2). Cette opération est réalisée dans le courant du XVIIIe siècle, comme tendent à l’indiquer les nombreux remplois de pierres sculptées dans ces aménagements. La fonction de l’escalier n’est pas comprise : il aurait pu permettre l’accès, via une échelle, à la porte de communication donnant sur la tourelle du clocher établie à la croisée du transept. Mais, cette proposition paraît peu probable. Il pourrait avoir servi d’accès à un étage compris dans le transept nord, mais aucun indice ne permet d’accréditer cette solution. Enfin, l’absence de porte vers la nef fait rejeter l’idée d’un escalier de chaire.

Une cinquième et une sixième phase de construction sont engagées dans le courant des XIXe et XXe siècles, d’abord au moment de la fermeture par une maçonnerie, de l’arcade de communication du bras de transept avec le collatéral nord (fig. 3), d’autre part, lors de l’extension de la sacristie sur l’ancienne chapelle orientale, dont la reprise est bien visible sur le mur oriental du transept nord.

L’ensemble de ces observations, mises en perspectives avec les phases générales de construction du sanctuaire, révèlent le plan très « bénédictin » de cet ancien prieuré-cure du XIIe siècle rattaché à Cluny, et les nombreux désordres qu’il eut à subir au cours du temps.

Jean-Luc PIAT