HADÈS Archéologie

Chez Marot, RN 10

Fiche

  • Responsable : Benoit GARROS
  • Période de fouille : 2014
  • Localité : Reignac (Charente)
  • Type d’opération : 
  • Période : 
  • Agence : ATLANTIQUE

Résumé

Reignac est une commune localisée au sud-ouest du département de la Charente. Elle se situe dans le périmètre extra-urbain de la ville de Barbezieux-Saint-Hilaire dont elle est distante d’un peu plus de 5 km au nord. Le lieu-dit « Chez Marot », locus de la présente étude, s’inscrit à l’extrémité sud-ouest de cet espace, en limite communale avec le Tâtre. Il prend place sur la rive droite du Trèfle sur un terrain culminant à 115 m NGF.

Cette opération a été motivée par l’élargissement routier en 2 x 2 voies de la RN 10 entre Reignac et Chevanceaux sur un peu plus de 11 km. Le diagnostic archéologique, préalable à ces grands linéaires, a mis en évidence cinq indices de sites s’échelonnant du Paléolithique à l’époque moderne. Les éléments recueillis à Reignac identifient une occupation de la fin du XIVe siècle dont les artefacts et les entités sont susceptibles de renseigner un habitat.

Le site s’inscrit à l’interface des deux horizons géologiques principaux de la région. Sur la partie ouest de l’emprise, en contrebas, affleure le toit des formations marines calcaires tuffoïde du Campanien (Secondaire) ici peu induré. Les dépôts détritiques du Tertiaire forment le substrat de la partie orientale. Il s’agit de formations continentales de la fin de l’Eocène (Sidérolothique) formant des îlots de collines en place le long des lignes de crête. Au niveau du site, la vallée du Trèfle est encore étroite, car elle incise le Sidérolithique jusqu’au sommet des calcaires. Cette hydrographie a donné naissance à une vallée fossile, avec des profils adoucis par un manteau de dépôts argilo-sableux recouvrant les pentes de part et d’autre du Trèfle (fig. 1).

Malgré une emprise restreinte de 2500 m2 et une densité réduite de mobilier, la fouille a permis de compléter les données du diagnostic en mettant au jour 349 structures, la plupart fossoyées. On dénombre des silos, des fosses dépotoirs à rejets alimentaires, des foyers, des fossés, ainsi que deux bâtiments d’une dizaine de mètres carrés. L’occupation s’illustre plus spécifiquement par la présence d’un édifice d’un peu moins de 200 m2 associé à un souterrain. Cet ensemble met en avant une hétérogénéité typologique au sein d’une uniformité temporelle du bas Moyen Âge (fig 2).

Les vestiges sont implantés uniformément au sein de l’emprise avec toutefois la reconnaissance d’un secteur dépourvu d’entités sur la frange occidentale à proximité du Trèfle. Il présage probablement du maintien d’une zone tampon pour se prémunir de l’humidité. Le reste des aménagements fait état d’une répartition cohérente dont la structuration dessine sans nul doute le schéma plus ou moins typique de l’établissement agricole médiéval pour cette période et région. La maison édifiée initialement sur poteau connaît une évolution architecturale avec la mise en œuvre de murs bahuts (fig. 3). Elle est couplée à des agrandissements sous-tendant certainement des logiques familiale et économique. L’analyse du souterrain dans sa fonctionnalité et son implantation montre à plus d’un titre son rôle d’annexe, complément à l’habitat (fig. 4). Il trouve également une certaine résonance avec les silos en surface dans la perspective d’une production agricole et un stockage des denrées. Le corpus des macro-restes tend à privilégier l’exploitation des fruitiers à coques. La spatialisation homogène des unités bâties étaye l’hypothèse d’un établissement agricole planifié à l’occupation resserrée dans le temps. En l’état, le scénario d’un site destiné à la mise en valeur des terres paraît vraisemblable sans que l’on puisse en identifier le commanditaire.

Le mobilier céramique bénéficie de caractéristiques et de comparaisons typo-chronologiques qui concordent pour situer le lot entre la seconde moitié du XIVe siècle et le début du XVe siècle. La cohérence générale du corpus de dates radio-carbone laisse entendre néanmoins, avec trois datations antérieures, soulignées par des tessons, non pas les prémices de l’occupation, mais une présence anthropique indéterminée en périphérie dans le courant des XIIe-XIIIe siècles. La désertion du site intervient certainement dans le cadre de la déprise foncière qui accompagne la guerre de Cent Ans.

Benoit GARROS