HADÈS Archéologie

Chapelle Saint-Pierre d’Ourjout

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Fiche

Résumé

L’église Saint-Pierre d’Ourjout se trouve dans le village de Bordes-sur-Lez dans le département de l’Ariège, sur la rive orientale du Lez. Une opération archéologique de sondages dans le chœur de l’église a été demandée par la Conservation Régionale des Monuments Historiques au préalable d’un projet de restauration. Autorisée par le Service Régional de l’Archéologie d’Occitanie, cette intervention avait pour objectif d’observer les relations stratigraphiques entre le massif de l’autel et le mur de l’abside, porteur de décors peints datés du XIIe siècle. Il était demandé, en premier lieu, de comprendre les étapes de construction de l’autel et de vérifier l’existence éventuelle d’un autel antérieur. Il s’agissait ensuite d’observer les relations stratigraphiques entre les différents niveaux conservés et leur lien avec la construction et l’autel.

Deux sondages ont été réalisés, de part et d’autre de l’autel, mais la totalité du sol de l’abside a fait l’objet d’un nettoyage en raison de la découverte d’une calade.

Les investigations ont permis d’identifier plusieurs phases de travaux et d’aménagements, échelonnés entre les XIIe et XIXe siècles, dont la plupart concernent néanmoins les époques moderne et contemporaine.

Le premier élément qui est apparu au moment des investigations est une calade qui se trouvait immédiatement sous un niveau de remblai peu épais et quelques dalles de schiste simplement posées, lesquelles sont probablement à mettre en relation avec l’installation du plancher actuel (états 1 et 2). Assez bien conservée, elle remonte probablement au XVIIe siècle et se développe au-devant de l’autel (état 4). Elle présente un motif qui, sur sa partie centrale, pourrait évoquer la crucifixion sur le mont Golgotha, lequel était probablement encadré d’un décor de losanges. Très perturbée le long des murs sud et nord de l’abside, il semble qu’elle ait été endommagée, puis réparée (état 7), avant d’être remplacée par le plancher (état 10). On pourrait également envisager que sa destruction soit en relation avec le percement des baies de l’abside, phase qui a laissé une trace dans le sondage sud, sous la forme d’un remblai de démolition contenant des fragments d’enduits peints (état 5), lesquels peuvent être rattachés à certains éléments du décor qui sont aujourd’hui encore visibles sur les murs. La démolition partielle du mur de l’abside pour l’insertion de la baie nord semble intervenir plutôt dans le courant de l’époque moderne, sans pouvoir préciser plus avant, en raison de la très faible quantité de mobilier datable mis au jour dans ce niveau. Il est en revanche plus difficile de relier la destruction partielle de la chape à une phase précise, ni même d’en comprendre les raisons au regard des éléments à notre disposition. On sait simplement qu’elle intervient avant la création de la baie sud et peut-être avant la création de la calade, mais cela reste très incertain.

La maçonnerie de l’autel actuellement visible semble obtenir sa physionomie actuelle en trois temps. La construction d’un nouvel autel pourrait intervenir autour du XVIe siècle avec le creusement de tranchées de fondation dans la chape initiale, laquelle est contemporaine de la construction des murs de l’abside (état 3). Cet autel s’appuie contre la maçonnerie de l’abside et se pose en partie sur la chape initiale. Il est envisageable qu’un autel originel préexiste, mais aucune trace n’a pu en être observée. Il est probable que son emprise soit moins importante et que la construction d’un nouvel autel puisse trouver un écho dans l’agrandissement de l’église à l’ouest. Cette transformation du bâtiment a dû rendre nécessaire la présence d’un autel qui soit compatible avec les nouvelles dimensions de l’édifice. Aussi, la recherche du premier ne peut se faire sans envisager le démontage de la maçonnerie actuelle de l’autel et de la calade qui se développe au-devant afin d’apprécier plus clairement les traces archéologiques antérieures à ces deux états.

Cet autel a subi une réfection, à l’aide de matériaux hétérogènes, laquelle pourrait être mise en relation avec l’installation du retable et nouveau maître-autel à la fin du XVIIIe ou au début du XIXe siècle (état 8). Ce nouvel aménagement est par ailleurs sommairement évoqué dans une visite pastorale de 1774.

Les traces de ciment observées çà et là suggèrent bien évidemment une phase de consolidation postérieure, dans le courant du XIXe siècle au plus tôt, le ciment ne se généralisant qu’autour des années 1820-1850.

Enfin, la chape observée en fond de sondage et quelque peu malmenée par les différents travaux (états 2 et 4), sans que l’on puisse y trouver systématiquement une explication, est bien à rattacher à l’édifice roman, puisqu’elle passe très clairement sous les blocs de la première assise visible à l’intérieur du bâtiment (état 1). Il n’a en revanche pas été possible, dans cette fenêtre d’observation, de déterminer s’il s’agit d’un niveau de sol ou si la chape ceinturait simplement la maçonnerie intérieure.

Plusieurs éléments n’ont pu trouver d’interprétation en raison d’une méconnaissance de l’histoire de l’édifice. Un diagnostic a bien été réalisé sur l’ensemble bâti par J.-L. Rebière, Architecte en Chef des Monuments Historiques, en 2014, mais la compréhension de l’édifice et des niveaux observés dans le sondage ne saurait se passer d’une étude archéologique du bâti de fond. Plusieurs questions restent en suspens et laissent encore largement dans l’ombre l’évolution de l’église entre le XIIe siècle et le XIXe siècle. Les relevés pierre à pierre qui ont été réalisés dans le cadre de ce diagnostic mettent en évidence un certain nombre de reprises et d’incohérences qu’il serait intéressant d’observer de plus près et d’analyser.

Cécilia Pedini