HADÈS Archéologie

Cathédrale Notre-Dame

Fiche

Résumé

La cathédrale Notre-Dame de Luçon est un établissement religieux majeur du Marais poitevin qui reste peu étudié : la disparition et la dispersion des sources écrites anciennes s’ajoutent à l’absence complète de fouilles archéologiques avant notre intervention, motivée par la découverte fortuite, en mars 2012, de sarcophages lors des travaux de restauration du transept sud. Dans ce cadre, un sondage a été prescrit par le service régional de l’Archéologie dans le but d’identifier le potentiel funéraire dans l’emprise des travaux, d’appréhender les modes d’inhumation et de renseigner l’organisation stratigraphique des tombes dans le transept sud.

Au total, cinq phases d’occupations ont été repérées qui témoignent d’une succession de niveaux funéraires en relation avec l’évolution architecturale du transept sud et de la chapelle orientée qui y est aménagée.

La première occupation (phase 1) est caractérisée par un mur maçonné en blocs de calcaire et mortier de chaux jaunâtre orienté est/ouest. Ce vestige atteste d’une construction maçonnée dont la fonction reste indéterminée : elle est antérieure à une sépulture datée de 680 870 Cal AD.

La phase 2 est matérialisée par un niveau de huit sépultures en sarcophages de calcaire et pleine terre, apparu directement sous le sol actuel après dépose du dallage.

La fouille a permis de déterminer leur position primaire, suivant une orientation est/ouest.

Compte-tenu des perturbations successives que les sarcophages ont subies, aucun d’entre eux n’a livré d’ossements en place à l’exception de la sépulture en pleine terre (SP 1065). Ce niveau funéraire est daté de 680 870 Cal AD et correspond aux premières mentions du prieuré Notre-Dame de Luçon dans les archives du monastère de Saint-Philbert-de-Noirmoutier

La phase 3 correspond à des vestiges architecturaux qui témoignent de la construction du transept sud avec les piliers nord-ouest et nord-est, un niveau de sol qui leur est associé, et le mur sud du transept. En même temps, une cuve de sarcophage est réemployée : déplacée pour être accolée au mur ouest du transept, elle est installée en pente et sert de cendrier liturgique où sont rejetés les cendres et les charbons de bois des encensoirs. La datation de cette phase de construction du transept sud est attribuée au XIIIe siècle largo sensu.

La phase 4 est composée de deux tombes maçonnées avec un matériau apparenté au gypse ou au plâtre. L’architecture de ces sépultures révèle un mode funéraire exceptionnellement, inédit dans la région des Pays de la Loire pour la période des XVe – XVIIe siècles. Elles sont à mettre en lien avec l’évolution des pratiques funéraires au sein de Notre-Dame de Luçon qui est alors siège d’évêché (depuis 1317) et où d’importants travaux de réaménagements ont lieu notamment dans les chapelles des collatéraux nord et sud et dans le chœur. Manifestement, l’inhumation ad sanctos est privilégiée à cette époque. Ces sépultures ont livré des fragments de linceul, tissés en lin probablement blanchi, et un chapelet en os. Les individus inhumés sont des hommes ; leurs corps ont été moulés dans le gypse lors de la dépose dans les tombes. Une datation C14 les date des XVe-XVIIe siècles.

L’occupation la plus récente (phase 5) est composée des décors en gypse qui englobent les murs est, sud et ouest du transept et masquent les maçonneries sur la moitié de leur hauteur. Ces panneaux de gypse sont décorés de corps de moulures dorés et imitent le marbre pour certains. Ils sont contemporains du confessionnal construit à l’ouest et de l’abandon de l’inhumation ad sanctos

La fouille du transept sud a permis de mettre au jour des vestiges architecturaux qui éclairent sur le potentiel archéologique du site, révèlent une occupation antérieure au VIIe siècle et illustrent l’évolution de l’établissement religieux jusqu’à l’époque contemporaine. Des vestiges mobiliers ont été découverts dans un excellent état de conservation, notamment les fragments de textile issus des tombes maçonnées SP 1050 et SP 1057, et le chapelet en os. Ils viennent enrichir la compréhension des pratiques funéraires liées à ces sépultures hors du commun dont le mode de construction est déjà remarquable en soi. Pour des raisons de délais, les analyses et les études nécessaires à ces objets et à leur contexte n’ont pas pu être intégrées au présent rapport.

Caroline CHAUVEAU