HADÈS Archéologie

Le « castrum » de Roquefort

Nos métiers Production scientifique Opérations Le « castrum » de Roquefort

Fiche

  • Responsable : Pierrick STÉPHANT, Bernard POUSTHOMIS, Ugo CAFIERO
  • Période de fouille : 2005, 2014-2016
  • Localité : Sorèze (Tarn)
  • Type d’opération : ,
  • Période : 
  • Agence : MIDI

Résumé

2005

Le site de Roquefort se situe sur la commune de Sorèze, à l’écart de toute habitation sur le versant nord de la Montagne Noire. À l’extrémité d’une arête rocheuse dominant une gorge profonde creusée par le Sor, les vestiges du castrum, très arasés, se placent sous un couvert végétal dense où quelques éléments bâtis subsistent en élévation, notamment une belle tour pentagonale et une portion de courtine percée d’une large porte. Préalablement à la restauration et à la mise en valeur du castrum, le gestionnaire du site et le Service Régional de l’Archéologie de Midi-Pyrénées ont convenu de la réalisation d’un état des lieux archéologique appuyé sur une prospection et un levé topographique.

Cette étude montre l’existence d’un vaste ensemble médiéval juxtaposant un château et un habitat. Le réduit seigneurial est placé en situation dominante, sur la terrasse la plus élevée, au devant du versant et à l’abri d’un large fossé. L’analyse des maçonneries montre un état antérieur à l’enceinte et à la tour actuelle. Il s’agissait peut être seulement d’une enceinte quadrangulaire qui fut modifiée dans son tracé au nord est et dotée d’une tour pentagonale, probablement durant la seconde moitié du XIIIe siècle.

Les indices d’un habitat se répartissent ensuite sur deux terrasses concentriques et étagées formant le castrum proprement dit. La première conserve un ensemble d’indices de constructions qui laissent entrevoir des caractères organiques clairs : une terrasse ceinte d’une courtine, organisée autour d’un axe de circulation est ouest, l’habitat s’organisant plus ou moins régulièrement de part et d’autre de cet axe. Il faut toutefois ajouter un bémol à cette vision car une grande partie des vestiges ne sont pas tous concordants et laissent subsister de nombreuses inconnues pour le flanc sud de la terrasse. L’enceinte elle même a connu des modifications et un remaniement de sa porte orientale. La seconde terrasse, si elle n’en est pas moins riche en témoins de construction, pour sa partie sud, présente une organisation plus floue, adaptée au relief tourmenté du secteur. Elle fait figure de barri et semble avoir fait partie du castrum dans un second temps.

L’organisation générale du site rappelle étrangement celle du castrum de Durfort implanté à l’entrée de la vallée qui, du XIIe au XIVe siècle fut partagé entre l’abbaye de Sorèze et le seigneur de Roquefort.

S’il est manifeste que les maçonneries conservées en élévation sont menacées de disparaître, il apparaît que les murs ont des assises supérieures disjointes, dégradées par l’érosion. Pour que les assises inférieures de ces murs ne suivent pas la même voie, il convient de ne dégager aucun vestige enfoui sans la certitude qu’il sera immédiatement consolidé et surtout entretenu.

Pierrick STÉPHANT

 

2014

Le castrum de Roquefort, sur la commune de Sorèze (Tarn), est mentionné pour la première fois en 1035. Le site forme un verrou dans la profonde vallée du Sor, une des principales voies de pénétration dans la Montagne Noire.

Au XIIe siècle, le seigneur de Roquefort est vassal des Trencavel, vicomtes d’Albi, Carcassonne et du Razès. Durant l’épisode cathare, le castrum joue un rôle de premier plan en servant de refuge aux hérétiques puis dans l’organisation de filières de fuite des hérétiques. Le site semble abandonné au XVe siècle après qu’une bande de Routiers s’y soient retranchés pour écumer la région durant quelques années.

Bien que très arasés, les vestiges montrent clairement une vaste enceinte englobant un bourg dominé par un réduit castral. À Roquefort, le réduit seigneurial forme une terrasse de 300 m2 environ, ponctuée par une tour pentagonale à éperon plein (fig. 1).

Après un état des lieux archéologique appuyé sur une prospection et un levé topographique réalisés par HADÈS en 2005, une auscultation de cette plateforme a été réalisée en 2014 avec l’ouverture de quatre sondages manuels. Cette petite intervention d’une semaine devait permettre de compléter le plan et documenter la stratigraphie du secteur en prélude à des recherches de plus grande ampleur.

Au bilan, le plan de l’enceinte du réduit castral a été précisé, l’entrée étant désormais localisée en bordure sud de la forte pente qui ceinture de la plateforme, pente dans laquelle devait être aménagé un escalier (fig. 2). Le rempart, bâti au mortier, présente une épaisseur variable en fonction de l’exposition à l’attaque. Même si un seul mur intérieur a été identifié, lié à la terre, la découverte de tessons de tuiles, de fragments d’ardoises et de lauses caractérise l’existence de bâtiments sur cette terrasse. Les niveaux de sol semblent se situer entre 0,70 et 1 m sous le niveau actuel, à l’exception de la base de la tour où existe un très épais remblai de gravats de démolition.

Pour ce qui concerne la dernière occupation de la plateforme, sinon des constructions, on note une grande homogénéité chronologique du mobilier (céramique et verre), qui semble concentrée dans la 1ère moitié du XIVe siècle.

Parmi celui-ci la présence de résidus d’activité métallurgique est particulièrement intéressante car elle indiquerait l’existence d’un four dans l’enceinte du réduit castral.

Bernard POUSTHOMIS

 

2015

Ces travaux ont été prolongés, en 2015, par une prospection géophysique, réalisée par A. Camus d’ULR-Valor, et de nouveaux sondages pour en valider les résultats. La carte de la résistivité électrique multi-profondeurs obtenue a conduit à l’implantation de deux sondages. Ils ont tous deux révélé la présence de murs, enfouis de 0 à 0,10 m sous la surface, dont les tracés correspondent à des orientations cohérentes avec les structures connues. Ces découvertes permettent, en complément de celles réalisées en 2014, de commencer à appréhender l’espace castral, et à formuler des hypothèses sur ses subdivisions et son organisation.

Ces sondages ont également permis de mettre au jour du mobilier, notamment céramique, qui confirme les datations proposées en 2014, attribuées à la première moitié du XIVe siècle, voire à la seconde moitié du XIIIe siècle. En outre, la découverte d’un probable fragment de bas fourneau abonde et renforce l’hypothèse de l’existence d’une activité métallurgique dans l’enceinte seigneuriale.

Ugo CAFIERO

 

2016

Ces investigations préparatoires, se sont poursuivies en 2016 par une fouille programmée annuelle destinée à évaluer le potentiel archéologique du site. Cette recherche a permis de confirmer les premières hypothèses formulées à l’issue des campagnes de sondages préalables, et au-delà a montré que le réduit seigneurial était fortement structuré.

La fouille a permis de reconnaître la presque totalité de l’enceinte castrale, de compléter et de réévaluer les propositions de restitution topographique de 2005 : l’intégralité de la courtine sud a été dégagée, ainsi que la porte d’accès au réduit, ouverte dans ce mur. À l’ouest et au nord, le parement externe des murs a pu être reconnu presque partout et l’angle nord-ouest de l’enceinte a pu être relevé à l’intérieur et à l’extérieur du réduit. Ces nouvelles données ont permis de reconsidérer l’épaisseur des murs, côté nord, qui s’est révélée être nettement inférieure à celle des courtines sud et ouest.

À l’intérieur du réduit, six larges murs ont été mis au jour, dessinant les contours d’au moins cinq espaces clos (cour et/ou bâtiments ?), entre lesquels ont été identifiés de possibles zones de passage et des espaces de circulation (fig. 2).

Les recherches ont également montré que le site était bien conservé. Plusieurs éléments de chronologie relative témoignent de diverses évolutions dans l’organisation de la plateforme, et de l’existence de vestiges antérieurs conservés sous les derniers états d’occupation du réduit.

En chronologie absolue, deux grandes lignes semblent se dessiner avec une importante densité de mobilier daté de la fin du XIIe siècle et surtout de la première moitié du XIIIe, avec une continuité probable dans ce siècle qui reste à mesurer. Ce mobilier est présent dans l’ensemble des niveaux d’abandon qui ont été atteints par les premiers décapages et ont également fourni en quantité moindre des lots de mobiliers plus tardifs, dont des céramiques et plusieurs pièces métalliques, attribués à la seconde moitié du XIVe siècle. On a donc l’impression que le château a été intensément occupé dans le courant du XIIIe siècle, et qu’il a vu ensuite un regain d’activité peut-être plus ponctuel vers la fin du XIVe siècle. Il ne semble pas, au vu des données recueillies à ce jour, qu’on puisse distinguer une occupation véritablement continue entre le plein XIIIe siècle et la fin du XIVe.

Ugo CAFIERO

 

2017

Le castrum de Roquefort, dans la montagne noire, se situe aux confins de la commune actuelle de Sorèze sur un éperon rocheux en surplomb de l’étroite vallée du Sor, une des principales voies de pénétration dans la montagne noire. Le site est organisé sur deux terrasses, concentriques et étagées, subordonnées à une plateforme sommitale. Cette dernière est occupée par un réduit castral que domine toujours une imposante tour pentagonale à éperon.

Une rapide prospection de la parcelle a en outre révélé l’existence d’un quartier bas inédit abrité sous le flanc sud du castrum et d’au moins un moulin près du Sor.

Le castello qui vocatur Rocafort qui est in ribera de Sor est mentionné pour la première fois, dans le cartulaire des Trencavel, au plus tard, en 1032. Il connaît son apogée à la fin du XIIe siècle. Il appartient au comté de Toulouse mais les seigneurs de Roquefort évoluent dans l’entourage des Trencavel, vicomtes d’Albi, de Carcassonne et du Razès, dont ils sont vas­saux. Au déclenchement de l’épisode cathare, le centre de gravité de la sei­gneurie s’est déplacé à Montréal (Aude) et à Montgey (Haute-Garonne) et le castrum, relativement isolé, finira par servir de refuge aux hérétiques (jusqu’à 300) puis de plaque tournante dans l’organisation de filières de fuite vers l’Italie. Il semble définitivement abandonné à la fin du XIVe ou au tout début du XVe siècle.

Après la fouille de deux maisons, réalisée en 1980 par Jacques Albarel, les recherches sur Roquefort sont relancées en 2002 sous l’impulsion de Pierre Clément nouveau propriétaire du site et aboutissent, en 2008, à la réunion d’un colloque organisé à Sorèze dont les actes, publiés l’année sui­vante, dressent un bilan historique et archéologique très complet du site.

En parallèle, des restaurations sont entreprises sur la porte d’entrée du castrum puis sur la tour pentagonale. Le castrum est inscrit au titre des Monuments Historiques en 2010.

En 2014 et 2015, les recherches se poursuivent dans le sol et se concentrent dans le réduit castral avec deux campagnes de sondages et une prospec­tion géophysique. Ces investigations préparatoires, se sont poursuivies en 2016 par une fouille programmée annuelle destinée à évaluer le poten­tiel archéologique du site.

Cette dernière recherche a permis de confirmer les premières hypothèses formulées à l’issue des campagnes de sondages préalables, et au-delà a montré que le réduit seigneurial était fortement structuré (fig. 1).

La presque totalité de l’enceinte castrale a ainsi été reconnue, et les pro­positions de restitution topographique de 2005 ont été complétées ou réé­valuées : l’intégralité de la courtine sud a été dégagée, ainsi que la porte d’accès au réduit, ouverte dans ce mur. À l’ouest et au nord, le parement externe des murs a pu être reconnu presque partout et l’angle nord-ouest de l’enceinte a pu être relevé à l’intérieur et à l’extérieur du réduit. Ces nou­velles données ont permis de reconsidérer l’épaisseur des murs, côté nord, qui s’est révélée être nettement inférieure à celle des courtines sud et ouest.

À l’intérieur du réduit, la base de la tour maîtresse a été entièrement déga­gée et six larges murs ont été mis au jour sur la plateforme, dessinant les contours d’au moins cinq espaces clos (cour et/ou bâtiments ?), entre les­quels ont été identifiés de possibles zones de passage et des espaces de cir­culation (fig. 2).

Les recherches ont également montré que le site était bien conservé. Plusieurs éléments de chronologie relative témoignent de diverses évolu­tions dans l’organisation de la plateforme, et de l’existence de vestiges anté­rieurs conservés sous les derniers états d’occupation du réduit.

En chronologie absolue, deux grandes lignes semblent se dessiner avec une importante densité de mobilier daté de la fin du XIIe siècle et surtout de la première moitié du XIIIe, avec une continuité probable dans ce siècle qui reste à mesurer. Ce mobilier est présent dans l’ensemble des niveaux d’abandon qui ont été atteints par les premiers décapages et ont également fourni en quantité moindre des lots de mobiliers plus tardifs, dont des céra­miques et plusieurs pièces métalliques, attribués à la seconde moitié du XIVe siècle. On a donc l’impression que le château a été intensément occupé dans le courant du XIIIe siècle, et qu’il a vu ensuite un regain d’activité peut-être plus ponctuel vers la fin du XIVe siècle. Il ne semble pas, au vu des données recueillies à ce jour, qu’on puisse distinguer une occupation véritablement continue entre le plein XIIIe siècle et la fin du XIVe.

Ugo CAFIERO

 

2018

Le castrum de Roquefort, dans la montagne noire, se situe aux confins de la commune actuelle de Sorèze sur un éperon rocheux en surplomb de l’étroite vallée du Sor, une des principales voies de pénétration dans la montagne noire. Le site est organisé sur deux terrasses, concentriques et étagées, subordonnées à une plateforme sommitale. Cette dernière est occupée par un réduit castral que domine toujours une imposante tour pentagonale à éperon.
Une rapide prospection de la parcelle a en outre révélé l’existence d’un quartier bas inédit abrité sous le flanc sud du castrum et d’au moins un moulin près du Sor.

Le castello qui vocatur Rocafort qui est in ribera de Sor est mentionné pour la première fois, dans le cartulaire des Trencavel, au plus tard, en 1032. Il connait son apogée à la fin du XIIe siècle. Il appartient au comté de Toulouse mais les seigneurs de Roquefort évoluent dans l’entourage des Trencavel, vicomtes d’Albi, de Carcassonne et du Razès, dont ils sont vassaux. Au déclenchement de l’épisode cathare, le centre de gravité de la seigneurie s’est déplacé à Montréal (Aude) et à Montgey (Haute Garonne) et le castrum, relativement isolé, finira par servir de refuge aux hérétiques (jusqu’à 300) puis de plaque tournante dans l’organisation de filières de fuite vers l’Italie. Il semble définitivement abandonné à la fin du XIVe ou au tout début du XVe siècle.

Après la fouille de deux maisons, réalisée en 1980 par Jacques Albarel, les recherches sur Roquefort sont relancées en 2002 sous l’impulsion de Pierre Clément nouveau propriétaire du site et aboutissent, en 2008, à la réunion d’un colloque organisé à Sorèze dont les actes, publiés l’année suivante, dressent un bilan historique et archéologique très complet du site.

En parallèle, des restaurations sont entreprises sur la porte d’entrée du castrum puis sur la tour pentagonale. Le castrum est inscrit au titre des Monuments Historiques en 2010.

En 2014 et 2015, les recherches se poursuivent dans le sol et se concentrent dans le réduit castral avec deux campagnes de sondages et une prospection géophysique. Ces investigations préparatoires, se sont poursuivies en 2016 par une fouille programmée annuelle destinée à évaluer le potentiel archéologique du site.
Cette dernière recherche a permis de confirmer les premières hypothèses formulées à l’issue des campagnes de sondages préalables, et au-delà a montré que le réduit seigneurial était fortement structuré (fig. 1).

La presque totalité de l’enceinte castrale a ainsi été reconnue, et les propositions de restitution topographique de 2005 ont été complétées ou réévaluées : l’intégralité de la courtine sud a été dégagée, ainsi que la porte d’accès au réduit, ouverte dans ce mur. À l’ouest et au nord, le parement externe des murs a pu être reconnu presque partout et l’angle nord-ouest de l’enceinte a pu être relevé à l’intérieur et à l’extérieur du réduit. Ces nouvelles données ont permis de reconsidérer l’épaisseur des murs, côté nord, qui s’est révélée être nettement inférieure à celle des courtines sud et ouest.

À l’intérieur du réduit, la base de la tour maîtresse a été entièrement dégagée et six larges murs ont été mis au jour sur la plateforme, dessinant les contours d’au moins cinq espaces clos (cour et/ou bâtiments ?), entre lesquels ont été identifiés de possibles zones de passage et des espaces de circulation (fig. 2).

Les recherches ont également montré que le site était bien conservé. Plusieurs éléments de chronologie relative témoignent de diverses évolutions dans l’organisation de la plateforme, et de l’existence de vestiges antérieurs conservés sous les derniers états d’occupation du réduit.

En chronologie absolue, deux grandes lignes semblent se dessiner avec une importante densité de mobilier daté de la fin du XIIe siècle et surtout de la première moitié du XIIIe, avec une continuité probable dans ce siècle qui reste à mesurer. Ce mobilier est présent dans l’ensemble des niveaux d’abandon qui ont été atteints par les premiers décapages et ont également fourni en quantité moindre des lots de mobiliers plus tardifs, dont des céramiques et plusieurs pièces métalliques, attribués à la seconde moitié du XIVe siècle. On a donc l’impression que le château a été intensément occupé dans le courant du XIIIe siècle, et qu’il a vu ensuite un regain d’activité peut-être plus ponctuel vers la fin du XIVe siècle. Il ne semble pas, au vu des données recueillies à ce jour, qu’on puisse distinguer une occupation véritablement continue entre le plein XIIIe siècle et la fin du XIVe.

Pour les périodes antérieures en revanche, dans la zone 1 et dans la zone 2 (ES 1), la campagne 2018 a permis de confirmer l’existence de niveaux préexistants aux élévation actuelles. Un bâtiment a notamment été mis au jour en zone 1, coupé de part en part par la courtine actuelle, et des niveaux d’occupation et d’artisanat (forge) ont été observés dans l’entité spatiale 1. Si on considère que la courtine et la tour actuelles ont été érigées à la fin du XIIe ou au tout début du XIIIe siècle, ces découvertes pourraient être attribuées au XIIe siècle. Le mobilier céramique et métallique découvert cette année semble confirmer cette datation.

Ugo CAFIERO