HADÈS Archéologie

3 rue du Pilori

Fiche

Résumé

Le projet de réhabilitation de l’immeuble sis 3 rue du Pilori à Bayonne, dont le mur fermant la parcelle à l’est se trouve sur le tracé du castrum antique, a nécessité la prescription d’une étude archéologique préalable aux travaux de réhabilitation. Les investigations ont porté en priorité sur le mur oriental de la cour, sur toute la hauteur de l’élévation (fig. 1), ainsi que sur le mur oriental du premier étage à l’intérieur du bâtiment. L’objectif de cette étude était d’abord de mesurer l’étendue des vestiges conservés du rempart antique de Bayonne à cet endroit, mais également d’identifier et de caractériser les constructions anciennes qui se sont appuyées sur la fortification afin de comprendre l’évolution générale de l’immeuble.

Les investigations permettent de confirmer les observations déjà faites par J.-P. Fourdrin sur plusieurs sections du rempart de la ville. Conformément aux attentes de la prescription, le parement interne est effectivement conservé au rez-de-chaussée sous la forme de quatre sections comportant respectivement six, trois, dix et deux assises de moellons cubiques de petit appareil en calcaire dur de Bidache. Chaque section est séparée par un ressaut marquant un retrait de maçonnerie oscillant de 0,06 m à 0,10 m et chacune est caractérisée par un léger fruit pouvant aller jusqu’à 0,10 m. Aucun aménagement susceptible de correspondre à un système d’échafaudage n’a été clairement identifié. Au niveau du plancher PLA 01, qui sépare le rez-de-chaussée du premier étage, seul le blocage du rempart antique est conservé, lequel a été dégraissé d’environ 1,50 m. Il est par ailleurs également visible à l’extrémité nord au rez-de-chaussée, en raison du déparementage du rempart pour une raison indéterminée. Au premier étage, il sert de mur de façade ouest à la maison sise dans la parcelle 178 (13 rue de la Salié), laquelle correspond au premier bâtiment édifié contre la section orientale externe du rempart antique.

Plusieurs travaux de réfection, essentiellement sous forme de plaquages de briques, sont visibles çà et là sur le blocage. Elles pourraient être mises en relation avec le dégraissement lui-même qui aurait entraîné un détachement différentiel de la maçonnerie. Au deuxième niveau, un mur, contemporain de l’installation de cette maison, a été posé sur le blocage du rempart. La seule ouverture restituable à l’ouest est une fenêtre à linteau droit donnant sur la cour. À l’intérieur, au premier étage, aucun élément n’a permis de déterminer la présence d’une ouverture. Cette maison est initialement élevée sur deux niveaux (R+1 et R+2) comme l’attestent les traces de l’ancienne toiture en tuiles plates. Elle ne peut être précisément datée, puisqu’aucun caractère discriminant ne permet de l’attribuer à une période de construction. On sait simplement qu’elle existe en 1674, puisqu’elle est représentée sur un plan de la ville. Comme la maison occupant la parcelle 180 (3 rue du Pilori) y figure également, on la suppose antérieure, sans pouvoir préciser plus avant.

Elle est surélevée d’un niveau avant l’édification de la maison du 3 rue du Pilori comme l’attestent la maçonnerie qui surmonte l’ancrage de la première toiture et les relations stratigraphiques entre les trois maisons qui se rencontrent dans la cour. La maison de la parcelle 178 est construite en premier, puis la maison de la parcelle 180 est édifiée et enfin celle de la parcelle 177 (immédiatement au sud de la parcelle 180). L’antériorité du 3 rue Pilori sur la maison qui occupe le sud de la cour nous est indiquée par le plan de Bayonne de 1674 qui met en évidence un grand espace vide à son emplacement, lequel rejoint l’impasse de l’ancienne Halle au niveau de la parcelle 177. Elle est en revanche représentée sur un plan de 1700, ce qui nous donnerait une date de construction finalement assez précise, si ces plans sont justes. Cela pourrait par ailleurs être mis en relation avec une densification de l’espace urbain qui interviendrait vers la fin du XVIIe siècle comme une conséquence de la construction des fortifications de Vauban.

Cette étude met en évidence l’édification de bâtiments de part et d’autre de la section orientale du rempart en trois temps. Une première campagne voit l’installation d’habitations contre le parement externe du rempart, dans la rue de la Salié, de manière certaine avant 1674. Il est vraisemblable que ces constructions se sont installées dès l’époque médiévale, potentiellement vers le XIIIe siècle, puisque c’est au cours de ce siècle que le tracé de l’enceinte est modifié rendant la section orientale du rempart antique obsolète. La deuxième maison (parcelle 180, 3 rue du Pilori) est peut-être construite peu de temps après. Stratigraphiquement, elle est postérieure à la maison appuyée sur le parement externe, mais on ne peut préciser si son installation est ou non très éloignée dans le temps. Enfin, la dernière maison (parcelle 177) est vraisemblablement édifiée au cours  du dernier quart du XVIIe siècle (entre 1674 et 1700).

Si la stratégie d’occupation de l’espace de ces trois parcelles est assez bien maîtrisée, il est en revanche dommage que nous n’ayons pas davantage d’informations sur l’évolution urbaine de la ville à la suite de l’abandon de la section orientale du rempart. Aucun élément ne nous permet de mettre précisément en évidence la manière dont l’espace a pu être progressivement occupé au cœur même du grand Bayonne. Il aurait été intéressant, afin de mieux documenter cette parcelle, mais aussi la modification du rôle de cette partie de la ville, de se plonger dans les archives anciennes et particulièrement dans les fonds notariés afin de rechercher les actes d’acquisition de ces parcelles et de mettre au jour des prix-fait de construction, peut-être même quelques plans anciens plus précis de ce secteur de la ville afin de mieux cerner la manière dont ces constructions se sont implantées et développées dans la ville.

Cecila PEDINI