HADÈS Archéologie

Grottes fortifiées

Fiche

  • Responsable : Catherine BOCCACINO, Bernard POUSTHOMIS
  • Période de fouille : 1999
  • Localité : Lortet (Hautes-Pyrénées)
  • Type d’opération : 
  • Période : 
  • Agence : MIDI

Résumé

La mise en valeur et l’ouverture au public de grottes fortifiées à Lortet (Hautes-Pyrénées) s’inscrit dans un programme de travaux définis par la Compagnie d’Aménagement des Coteaux de Gascogne (C.A.C.G.) comprenant la mise en sécurité du site et l’enfouissement d’une ligne électrique.

Ces travaux portent sur un site à forte sensibilité archéologique, connu pour ses gisements préhistoriques magdaléniens grotte Piette fouillée en 1874 et grotte de l’Avent ou de l’Ours, explorée en 1883 et 1979 et pour son site médiéval fortifié composé de quatre grandes cavités naturelles, aménagées en logis. Le Service Régional de l’Archéologie de Midi-Pyrénées a confié à la société Hadès un diagnostic archéologique avant travaux afin d’évaluer la profondeur et l’état de conservation des sols anciens. Pour ce qui concerne le bâti, à la demande de la C.I.R.A.. grand Sud-Ouest, seule une tour escalier a été étudiée, les autres maçonneries étant pour l’instant exclues des recherches. Les grottes préhistoriques sont aussi exclues de ce programme car elles font l’objet d’une prescription du Service Régional de l’Archéologie. Trente mini sondages d’un mètre carré en moyenne ont donc été ouverts, dans la grotte des Brebis, au pied de la falaise, où des traces d’occupation médiévale avaient été signalées et dans les logis et galeries supérieures. L’accès nord a été débroussaillé et nettoyé pour étudier et topographier les marches taillées dans le rocher. Les résultats de cette intervention font état de 22 sondages positifs et 8 négatifs.

Les indices d’occupation positifs proviennent des sondages ouverts au pied de la falaise et dans les logis. L’occupation la plus ancienne est attestée dans la grotte des Brebis et se matérialise par un sol de cailloutis associé à des tessons de céramique de l’Age du Fer. Les autres sondages ont permis l’identification, dans la majorité des zones étudiées, du sol de circulation médiéval. Il s’agit d’un cailloutis de petites pierres calcaire, pris dans une terre organique brun clair, situé à faible profondeur (5 à 10 cm sous le sol actuel). Dans les entrées des galeries, ce sol est parfois percé de trous destinés à caler les poteaux en bois verticaux qui constituaient le système de fermeture et de cloisonnement des logis. Dans le logis 4, des trous de calage de poteaux peuvent être mis en relation avec des encoches taillées dans la paroi rocheuse verticale. Ces poteaux soutenaient les planchers des étages aménagés dans cette cavité, haute et étroite. Enfin, des vestiges maçonnés, presque entièrement arasés, permettent de restituer l’emprise au sol du mur formant le « boulevard des meurtrières ». Le caractère défensif douteux de cette construction est désormais revalorisé avec la découverte d’un fer de trait dans le sondage ouvert sous l’une des dites meurtrières. L’exploration du secteur de la Grotte de l’Ours s’est révélée négative dans le sens où aucune trace d’occupation n’y a été trouvée en place. Les quatre sondages ouverts sur le cheminement font état d’une épaisse couverture de terre végétale de 30 cm qui a piégé quelques mobiliers (fer d’âne, clous) issus du site médiéval, situé quelques mètres plus haut.

L’étude de la tour escalier reprend l’analyse qu’en en avait faite J. Omnès en 1988, en y apportant des précisions techniques complémentaires et en proposant une datation resserrée. Haute de près de 17 m dans son état actuel, elle est bâtie dans une cheminée karstique et utilise au mieux la topographie du lieu et la roche. À la base, une porte ouvre sur un escalier droit à deux volées, ensuite prolongé par une vis. L’originalité de cet escalier en vis (diam. : 161 cm) réside dans sa conception : un noyau formé de tronçons de colonnes sur lequel prend appui une voûte en berceau hélicoïdal (bâtie en blocage sur couchis) ancrée dans la maçonnerie périphérique. Les reins de la voûte servent de support aux marches bâties. Toutes les composantes de l’ouvrage ont été édifiées en même temps, la voûte assurant le contreventement.

Bien que non pourvue de meurtrières, cette tour escalier multiplie les éléments de protection. À la base, un glacis taillé dans le massif calcaire rend quasiment impraticable son accès sans l’aide d’un escalier de bois. La petite dimension de la porte et sa position surélevée, l’étroitesse des escaliers, et un débouché, au sommet, par une étroite trémie placée au centre d’une fosse rendent les grottes inaccessibles. On peut, de plus, supposer l’existence d’ouvrages défensifs en couronnement (crénelage, hourds).

Les parements de qualité, en moellons alternant le petit appareil rectangulaire et le moyen appareil cubique, associés à un type d’escalier roman dit « vis de Saint Gilles » font référence à la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle, par comparaison avec des constructions similaires de la vallée rhodanienne. Les sources historiques font défaut pour connaître le commanditaire d’un tel édifice. Mais, par comparaison avec des « spoulgas » récemment étudiés en haute Ariège, il y a fort à parier qu’il s’agit d’un important seigneur local.

Cette tour n’est pas le seul élément de fortification des grottes de Lortet. Divers murs et aménagements restent à étudier. Seule une analyse d’ensemble permettrait de mieux préciser l’organisation de ce site, que l’on peut assimiler à un château de falaise.

Catherine Boccacino et Bernard Pousthomis

Catherine BOCCACINO, Bernard POUSTHOMIS