HADÈS Archéologie

Château

Fiche

Résumé

Le château de Monts-sur-Guesnes, situé dans le nord du département de la Vienne a fait l’objet d’un projet de restauration afin de transformer ses bâtiments en office de tourisme et en logement. L’ensemble castral étant classé au titre des Monuments Historiques depuis 1979, une prescription a été émise pour une surveillance des travaux et une étude de bâti.

L’étude archéologique des élévations et le suivi de travaux effectués sur le château de Monts-sur-Guesnes ont permis de déterminer une nouvelle chronologie avec dix-huit phases d’évolution du site (fig. 1).

Dès le XIIe siècle, une famille « de Montibus » apparait dans plusieurs chartes relatives à des établissements religieux dont le prieuré de Guesnes dépendant de l’ordre de Fontevraud. L’analyse de cette documentation n’autorise aucune affirmation quant à l’existence d’un habitat seigneurial. A cette période, le principal propriétaire foncier des environs semble être l’abbaye de Cormery. Mentionnée dès 1139, l’église Saint-Laurent de Monts ne serait que l’annexe de l’un de ses prieurés-cures. L’édifice n’est pas encore localisé (phase I). En l’état des connaissances, il ne peut être question d’une chapelle castrale. La relation exacte entre l’abbaye de Cormery et la famille de Monts reste à découvrir.

Une première fortification est partiellement identifiée (phase II). Elle est composée de deux portions de courtine perpendiculaires et d’une, voire deux probables tours aux extrémités. L’absence d’un dispositif de flanquement à l’angle médian tend à minimiser la capacité défensive de l’élévation. Ces constructions sont traditionnellement attribuées au XIVe siècle. Elles seraient logiquement antérieures à 1369 puisqu’à cette date, Guy Odart obtient de Charles V des lettres de guet et de garde pour son « château » de Monts. Toutefois, rien ne permet aujourd’hui de corroborer cette hypothèse. La façade sud de l’aile sud se démarque par son épaisseur supérieure à toutes les autres élévations. Elle est flanquée d’au moins une tour circulaire. Malgré une intense restauration, l’architecture mériterait encore un relevé topographique et une analyse stratigraphique. La chronologie relative entre les deux ensembles bâtis reste à préciser. Au final, l’apparence de la fortification durant la guerre de Cent Ans ne peut être raisonnablement définie. Le statut de la fortification serait également le sujet d’un débat. Malgré une tentative d’usurpation du droit de haute justice en 1313, les différents seigneurs successifs parviennent seulement à élever la terre de Monts au titre de châtellenie en 1481. Jusqu’à cette date, le site fortifié serait donc à classer parmi les maisons fortes. Une nouvelle recherche en archives permettrait peut-être de trouver des occurrences renseignant sur la terminologie la plus adéquate.

Deux bâtiments, actuellement déconnectés, sont édifiés hors de l’emprise reconnue en phase II. Ils pourraient marquer une phase d’extension de la fortification. L’intégration de canonnières aux élévations oriente les datations vers les années 1420-1430. L’hypothèse d’une campagne de travaux financée par la famille Brillac est privilégiée. Nouvellement propriétaire, elle acquiert le site lors du mariage de Pierre de Brillac avec Jeanne Odard, dernière héritière de sa lignée. Ici encore, des recherches en archives pourraient améliorer les connaissances sur le statut du site. Dans l’éventualité d’une extension de l’assise de la fortification, la chronologie pourrait être affinée par l’étude des fossés. Au préalable, une prospection géophysique permettrait d’optimiser les investigations en cartographiant les anomalies de résistivité électrique et magnétique.

Les phases suivantes semblent correspondre à une réorganisation de l’habitat à l’issue de la guerre de Cent Ans. Plusieurs aménagements résidentiels, baies et cheminées (fig. 2), témoignent d’une volonté de moderniser et d’adapter l’architecture à l’évolution des styles. Vers 1480, une partie de l’aile sud est ainsi embellie d’un décor et de modénatures gothiques. Vers 1530, plusieurs baies sont agencées sur la même aile. Au cours de cette période, l’aile occidentale semble également réaménagée. La façade sur cour est arasée pour être intégralement remontée.

Les Guerres de Religion semblent impacter fortement le château, entraînant plusieurs démolitions (phase IX), dont certainement la tour-porche, ainsi que trois phases de reconstruction et de fortification. La courtine nord est d’abord rebâtie (phase X), probablement à la hâte. La façade intérieure de la tour-porche est réemployée pour servir de porche d’entrée. Deux tours d’angle viennent ensuite flanquer l’ensemble (phase XI). Leur construction soignée les différencie des édifications de la phase précédente. Les ouvertures de tir ainsi que les cheminées orientent la datation vers la fin du XVIe siècle. La famille du Bellay acquiert le château en 1589, il est possible qu’il faille lui attribuer ces bâtiments. La courtine orientale nécessite alors une reconstruction (phase XII). Les ouvertures de tir paraissent être des remplois, ce qui ne permet pas de proposer une datation. La qualité de la maçonnerie témoigne d’une édification dans l’urgence. Un nouveau bâtiment est créé dans l’aile nord-ouest (phase XIV) et l’ensemble des planchers sont mis à niveau, entrainant d’importantes modifications. Les ailes orientales et septentrionales ainsi que la chapelle sont édifiées à la toute fin du XVIIe siècle (phase XV). Ces constructions entraînent le bouchage d’un certain nombre d’ouvertures de tir, montrant que le site perd de son rôle de fortification au profit d’un lieu d’habitation.

Les phases XVI et XVII comprennent les traces de l’occupation des XIXe et XXe siècles alors que la dernière phase correspond aux différentes restaurations qui ont impacté le château depuis son classement au titre des Monuments Historiques en 1979.

Camille MARGUERITE